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Eska Crew - Instinct De Survie

< En Bref : Album "Instinct de Survie " sorti le 24 Août 2005.

< En concert le 13 Janvier à St Etienne au Hall C

< Site Internet : www.eskacrew.com et www.instinctdesurvie.com

Le Crew stéphanois répond à nos questions. Simplement.

Pouvez-vous vous présenter ?

On est de Saint Etienne. La formation Eska Crew existe depuis 1999. en premier lieu, en 1999, le groupe était constitué d’un pseudo noyau dur qui était composé de moi-même, Eska, DJ Wong et H-Kidam. Ensuite on a voulu développé une identité de scène plus conséquente, donc DJ Slim, Kenzho et Rewind se sont greffés au groupe. Au niveau de l’historique, c’est moi, Eska, qui débute en 1992 dans le rap et qui suit un cursus rap classique : MJC et tout ce qui va avec. Ensuite j’ai migré 3 ans à Lyon, au sein d’un collectif qui s’appelle « L’armée du ruban rouge ». je suis rentrée à la maison et on a constitué cette équipe en 1999. En 2000 on a fait un premier maxi vinyle « On a c’qu’il faut ». deuxième maxi « on reste tous » et là depuis le mois d’Août, la sortie de notre album « Instinct de survie ».


Quels sont les thèmes développés dans cet album ?

L’être humain dans son ensemble, tout en partant de l’identité de la personne qui écrit, c’est-à-dire moi-même. Qui suis-je ? comment suis-je ? que fais-je ? voilà ce sont les questions qui sont posées. Ça représente l’identité de tout le groupe car on a tous le même état d »esprit. On parle de l’être humain et c’est un voyage musical tout au long de l’album car on visite et revisite la musique en général : de la soul au rap, en passant par la chanson française et le rock. A chaque titre on a fusion entre le rap et d’autres styles musicaux.

C’est donc un album d’introspection ?

Oui on peut parler d’album d’introspection. C’est notre premier album et on parle de nous-même, de nous dans ce monde dans le rap, dans cette société. C’est nous dans notre quotidien, nous et ceux qui nous ressemblent c’est-à-dire l’être humain. On peut dire que c’est un album humain.

Comment vous voyez le milieu du rap en France ou à Saint Etienne?

On est un peu en dehors à Saint Etienne car on n’a pas de grand réseau à Saint Etienne. En plus c’est différent pour nous car on a signé en national donc on n’est plus en local. Donc on parlera plus du rap en national. C’est pas vraiment ce qui me parle le plus à titre personnel. C’est vrai que le rap français a vraiment beaucoup changé. Ce qui permettait avant de sortir les gamins de la rue les repropulse dedans maintenant, en faisant l’apologie du crime, du machisme, enfin tout ce qui constitue le discours qu’on entend actuellement dans le rap. Mais nous c’est différent, on est en décalage par rapport à ça, car on fait avant tout de la musique. On n’a pas envie d’être considérés par les autres artistes comme des rappeurs mais comme des artistes à part entière. Donc on a envie de se démarquer du rap d’aujourd’hui.

Et par rapport au public stéphanois, comment a-t-il accueilli votre album ?

Ben forcément il est derrière nous. Quand t’as un groupe de la ville qui est propulsé au niveau national et qui fait une semaine sur Skyrock, il en faut pas plus pour que ton public qui écoute cette radio et qui est de ta ville soit avec toi. Mais c’est comme on disait, là on est sorti du réseau local ; maintenant on se penche plus en national, comment l’album est accueilli en national. Ça se passe bien, ça peut toujours mieux se passer. Tous ceux qui sont amenés à écouter notre album accrochent. On est arrivé avec un certain pari, celui de dire qu’on ne fait pas un rap comme tout le monde. C’est du rap totalement différent, que ce soit musicalement ou en termes d’approche du texte. Les retours sont excellents donc on est contents.

Par rapport à d’autres groupes, vous vous situez où ?

On n’ est pas comme les autres groupes de rap, mais on ne dit pas ça en termes de supériorité. Il y a des groupes qui nous ressemblent, mais on situe plus sur ce créneau-là, c’est-à-dire celui où à partir du moment où on prend la plume, on ne raconte pas tout et n’importe quoi, on est réfléchi dans ce qu’on raconte, on est mature. C’est pas parce qu’on vend à des gamins de 14 ans, qu’il faut leur parler comme si on en avait 14. donc c’est une idée d’élévation de conscience. Nous on essaie de mettre un cran au dessus au niveau des idées d’un artiste. On essaie de démocratiser un peu plus le rap sans avoir à le fourvoyer. C’est plus notre démarche à nous.

Et au niveau de vos influences ?

On ne parlera pas vraiment de rap pour tout le monde. Moi je suis fan de la chanson française, je fais du rap depuis 92 donc le hip hop je le connais dans les moindres recoins. Aujourd’hui mon style c’est plus la chanson française. Et puis chacun dans le groupe a ses propres influences. Donc ça varie.

Donc votre groupe c’est une fusion entre toutes les influences de chacun ?

Oui c’est vraiment ça. C’est le mot d’ordre de l’album et de nos personnalités. Parce que même moi en écrivant, je suis un enfant de ce pays mais je suis aussi d’origine étrangère. A la fois totalement intégré et quand même différent. C’est pluriculturel : il y a un sicilien, un bosniaque, il y a un kabyle, un marocain berbère. Donc notre musique ne pouvait que transpirer de cette fusion culturelle.

Est-ce que vous vous sentez concernés par les événements qui ont eu lieu dans les banlieues ?

Largement, parce qu’on est avant tout des citoyens. Donc on est concernés par tout ce qui touche notre pays. Et principalement parce qu’on a parqué des gens pendant une trentaine d’années et que maintenant quand ça explose, tout le monde se rejette la faute les uns sur les autres. Un jour, c’est la faute d’un discours qui a duré 2 minutes, le lendemain c’est à cause des rappeurs, le surlendemain c’est à cause du système. La France est totalement perdue par rapport à ça et elle ne se rend pas compte qu’elle mène une politique qui est totalement dégradante pour certains. Quand on sait qu’il y a 40% de chômage dans ces quartiers, tout en sachant qu’on peut ne pas cautionner ce qui s’est passé.

Moi je ne cautionne pas ce qui s’est passé car je pars du principe que la révolte c’est avec la tête qu’on la fera et que tant qu’on la fera avec les mains, ben on sera considérés comme de simples sauvages. Donc à partir de là on ne nous écoutera jamais. Une bête féroce on la met en cage. Donc tant qu’on reflètera cette image de bête féroce, on nous mettra en cage, on ne sera pas plus entendus. Ce qui se passe en ce moment, c’est un effet médiatique. Voilà, le système français, il faut qu’il se rende compte du dysfonctionnement : quand on compte les crédits à des associations, faut pas s’étonner que les gamins après ne soient plus entourés et qu’on les retrouve à 10 ans traînant dehors à cramer une poubelle parce que ça fait bien. Le truc vient des 2 côtés quoi.

Il y a quelque chose chez nous aussi qu’il va falloir qu’on se dise. Je parle des minorités françaises, black, rebeu, faut q’on arrête de se dire qu’on sera entendus en gueulant. faut qu’on agisse de tous les côtés. Faire en sorte que le système français ne discrimine pas un Arabe bardé de diplômes et qui ne privilégie pas un Français à côté. Ça va être dur. Soit c’est utopique et ça ne marchera jamais, mais concrètement c’est l’une des seules solutions qu’on peut concrètement avoir sur cette poudre aux yeux qu’on nous jette à la télé ces dernières semaines. Donc tout le monde a sa responsabilité. Faut que nous aussi on s’intègre plus : ça ne fait que 40 ans qu’on est en France. Le peuple noir a mis 300 ans pour se faire accepter aux Etats-Unis. Donc il faut que chacun se dise « ça va commencer par moi ». il faut une plus grande responsabilité de toutes les communautés minoritaires en France et arrêter de se sentir que en victimes. On peut se faire comprendre différemment.

Maintenant, beaucoup plus léger : que pensez-vous du public lyonnais ?

Ça s’est toujours bien passé. Maintenant c’est pas un public qui a la meilleure réputation. Il y a des artistes qui ont un peu peur de jouer à Lyon. Donc on espère que ça se passera bien ce soir. Ça s’est toujours bien passé. Mais on part du principe que pour que ça se passe bien, il faut donner beaucoup de respect au public. Mais nous on aime bien Lyon, on aime bien cette ville.

 

Interview réalisée par l'équipe Vibe2Lyon, le 18/12/2005 lors du Hip Hop Christmas Festival au Transbordeur.

Date de publication : 03/01/2006

 
Site Officiel : www.paradis-assassine.com